www.anciensverts.com

Le match de Lille à Marseille (2-2), dimanche dernier, a été une parfaite synthèse de ce que réalise cette année l'équipe nordiste : brillante sur le plan collectif pendant une mi-temps, elle a laissé échapper une victoire qui lui tendait les bras en manquant deux occasions franches puis en concédant un but à la dernière minute. Son entraîneur Rudi Garcia nous explique comment fonctionne sa mécanique à la veille de la réception de Lorient. Il admet que le potentiel de son équipe est considérable. A condition qu'elle apprenne de ses échecs.

« Rudi Garcia, si on vous dit que Lille est une des équipes qui dégage le plus de maîtrise collective en L1, acceptez-vous le compliment ou voulez-vous nuancer ?
Je suis d'accord. C'est ce qu'on veut faire. Ma philosophie de jeu, c'est que mon équipe ait le ballon, qu'elle produise du jeu, qu'elle fasse tout pour se procurer des occasions et marquer. Ce qui nuance les choses, c'est le nombre de points perdus. On en a trop laissé échapper depuis le début de la saison.

Par manque d'expérience ou parce que l'équipe est trop joueuse, justement ?
Un peu des deux. D'abord, la jeunesse, effectivement. Seule la répétition des matches de haut niveau permet d'apprendre à gérer les situations et à ne plus reproduire ses erreurs. Ensuite, il y parfois un manque d'équilibre entre le jeu vers l'avant et le fait d'assurer un minimum quand on mène. Maintenant, assurer, ça ne veut pas dire exclusivement défendre. Au contraire, c'est continuer à garder le ballon haut et poser des problèmes à l'adversaire. On l'a très bien fait contre Saint-Etienne (3-0). A Marseille (2-2), on aurait pu aller chercher un troisième but qui nous aurait mis à l'abri. Maintenant s'il faut marquer trois fois à l'extérieur pour gagner, on ne gagnera pas souvent.

Quand vous entendez dire que votre milieu Cabaye - Mavuba - Balmont est le meilleur de la L1, c'est une formule, ou c'est la réalité ?
C'est délà agréable de l'entendre. L'évidence, c'est que ce sont trois garçons de grand talent et que leur addition donne un milieu de haut niveau. Ce qui m'ennuie, c'est de mettre un secteur en avant plus qu'un autre. Maa défense a aussi de la qualité. Et on est deuxième attaque, alors...

Qu'est ce qui rend ces trois joueurs si complémentaires, alors qu'ils ont profil comparable : volume de jeu, hargne, pas de grand gabarit...
Ce sont d'excellents joueurs de football, tout simplement. Ils sentent le jeu. Ils sont tombés dans la marmite de l'intelligence de jeu quand ils étaient petits. C'est facile de faire jouer ensemble de bons joueurs de ballon.

En ce moment, vous le ''déconstruisez'' un peu, ce milieu à trois. Est-ce pour vous rendre moins prévisible ?
Si je voulais vous faire un clin d'oeil, je dirais que c'est pour déjouer les pronostics de la presse. Mais c'est faux. C'est pour être moins prévisible pour l'adversaire et pour améliorer la performance de l'équipe, la seule chose qui compte pour moi. Contre Saint-Etienne et à Marseille, le système était un 4-2-3-1 avec Hazard derrière notre attaquant de pointe. Cela a excentré Balmont au poste de latéral droit, puis de milieu offensif droit. Ça s'est très bien passé, honnêtement. C'est une option de jeu, mais on peut revenir à notre milieu à trois si nécessaire, un système qu'on maîtrise parfaitement.

Quand vous êtes-vous rendu compte qu'Eden Hazard avait le niveau pour la L1 ?
D'entrée, sur ses performances à l'entraînement, il fallait être aveugle pour ne pas voir qu'il avait des qualités assez incroyables sur le plan offensif. Après, ce n'est pas le tout d'avoir du talent balle au pied. Il ne faut pas être un poids pour l'équipe sur le plan défensif. Il avait besoin de se mettre en tête que le football, c'est aussi un jeu sans ballon. Le placement, les déplacements, l'implication défensive, ça fait partie du jeu. Il écoute. Sous ses allures nonchalantes, il a envie de progresser, il garde la tête sur les épaules, et il est très bien entouré. Ça nous rassure. Il est plein d'audace et de fraîcheur. A dix-sept ans, heureusement. Mais il faut l'amener petit à petit, ne pas le brûler sous les projecteurs des médias. Il y en a trop qui se sont brûlés les ailes.

Quel est son meilleur poste ?
Il peut évoluer à tous les postes de l'attaque. Sa meilleure place devrait être un poste axial de joueur offensif. Mais pour sa construction personnelle, jouer sur les côtés sera très intéressant, avec quelques paramètres sur le plan défensif. Ça enrichira son bagage.

Ambitionnez-vous le Top 5, comme vos adversaires vous le promettent souvent ?
Pour l'instant, la réalité, c'est qu'on est huitième. Mais seulement à quatre points de Nice, deuxième. On fait partie du peloton qui chasse Lyon. Même si le fait d'être un peu caché n'est pas plus mal, il est vrai que mener ce peloton prouverait qu'on prend plus de poids. Le Championnat est un marathon qui ne souffre d'aucun relâchement. Il faudra le prouver dès samedi contre Lorient, qu'on est une équipe d'avenir. »

Propos recueillis par Cédric ROUQUETTE
Source : L'Equipe